Défi d'Halloween d'Alona Smith

La nuit était d’une bizarrerie sans nom. Le ciel était incroyablement sombre alors que la lune était pleine, mais ce n’était pas une lune comme les autres, c’était la lune rousse, la lune des assassins.
La jeune Andie tremblait de peur à l’idée que cette appellation si commune, cette légende dont elle entendait parler depuis qu’elle était enfant ne soit vraie.
Vêtue d’un long manteau à capuche qui lui couvrait le visage, elle rasait les murs pour éviter qu’on ne la voie ou pour éviter de croiser quelqu’un. Elle ne savait pas trop elle-même si elle avait envie de solitude ou d’aide.
Elle ne cherchait pas le moins du monde à cacher ses origines et brandissait sa baguette magique devant elle, au cas où elle ferait encore une mauvaise rencontre. Elle savait bien qu’en ces temps troublés, elle était relativement tranquille dans cette rue du quartier neutre de Londres, mais n’ayant pas la moindre possibilité, physique ou morale d’oublier le dernier sorcier qu’elle avait croisé, elle préférait être prudente.
Cette pensée lui arracha un rire hystérique
* Prudente, c’est bien le moment d’y penser ! Bien sûr, c’est facile de jouer la prudence des heures trop tard, quand le mal est fait…*
Prise de vertiges et de tremblements, elle s’arrêta un instant, s’assit sur le rebord du trottoir et, incapable de tenir plus longtemps, se mit à pleurer à chaudes larmes. C’était un soulagement, mais qui n’allait pas sans douleur.
Elle entendit des bruits de pas qui s’approchaient d’elle mais ne se redressa pas. Sa baguette était toujours bien serrée dans son petit poing d’adolescente mais elle avait pris sa décision : peu importe qui venait vers elle, elle voulait qu’on l’aide, qu’on la guide, elle commençait à perdre tous ses repères.
- Aidez-moi, je vous en supplie !
Ses sanglots redoublèrent quand elle entendit le son étranglé de sa voix et elle leva ses yeux humides vers la personne qui se tenait devant elle, oubliant presque qu’ainsi, elle allait révéler son visage atrocement marqué, couvert de bubons purulents dont les couleurs suivaient toutes les déclinaisons de l’arc-en-ciel et qui avaient même tendance à exploser parfois, si elle se fiait aux tâches graisseuses et répugnantes qui couvraient son chemisier autrefois blanc.

Roxann sautait un pied sur l'autre le long de Hyde Park, la nuit était noire il ne devait pas faire plus de vingt-trois heures trente. Ses cheveux, aussi roux que les cratères de la lune qui se tenait au-dessus d'elle se balançaient au rythme de son étrange marche. Elle ne se souciait pas de cette Lune rousse ni même de la menace que celle-ci signifiait. Non, Roxann, elle la trouvait juste belle, bizarre, grosse, mais pas menaçante. La jeune fille avait quitté la maison, encore une fois pendant que ses parents dormaient. Elle avait le défaut de toujours trop bouger, de ne jamais rester en place. Ils ne savaient jamais qu'elle partait la nuit. Et que la lune soit rouge, noire ou blanche, cela n'avait aucune importance. Elle n’avait pas prit la peine de se changer, elle avait gardé sur elle son pyjama rose bonbon aux lapins qui dormaient et ronflaient un bonnet de nuit sur la tête mais au lieu de chausson elle avait mit quand même des baskets. Dans cette nuit froide et silencieuse, Roxann riait sans retenue, se moquant de la Lune et de sa menace, sautant de dalles en dalles comme dans un jeu de marelle. Parfois, de rares passants qui se promenaient encore, la regardaient étonnés par son étrange attitude.

Elle avait l’intention d’entrer dans Hyde Park cette nuit-là, simplement pour aller voir et caresser les magnifiques chevaux qui s’y trouvaient (oui, elle avait un but…). Mai difficile de trouver l’entrée du parc. Elle s'arrêta un moment pour enlever ses chaussures, elle avait trop chaud dans ses baskets. Ah oui, ressentir le sol froid par la plante des pieds était bien plus agréable que dans d'être dans des chaussures. Et ce fut à ce moment-là qu'elle entendit une voix, des pleurs un peu plus loin.

*Tiens, que se passe-t-il ?

Elle hésita un moment, continuer sa petite promenade, ou aller voir ce qu'il se passait ? La curiosité l'emporta et elle se dirigea alors à l'opposé du parc, dans une petite ruelle encore plus sombre que là où elle se trouvait.

*Tant pis, j'irai au parc tout à l'heure*

Et puis, elle l'aperçut, cette silhouette au bord du trottoir en face du sien et traversa la route pour voir ce qu'il se passait deux mètres plus loin. Elle préféra prendre aussi sa baguette qui sait, peut-être était-ce quelqu'un à qui il valait mieux faire attention, elle n'avait peut-être que quinze ans et ne se servait pas encore bien des sortilèges qu'elle avait appris à l'école, mais peut-être que cela lui serait utile. Mais en s'approchant, elle s'aperçut que la silhouette faisait plutôt jeune. Roxann fit un bond en arrière quand la jeune personne montra son visage. Il était constellé d’horribles pustules ou verrues ou elle ne savait trop quoi de toutes les couleurs.

*Beurk*

-Oulah ! Mais que t'est-il arrivé ? S'exclama-t-elle un peu écoeurée par la peau de l'adolescente

Finalement, elle s'agenouilla près de la jeune fille qui semblait être elle aussi une sorcière, puisqu'elle vit sa baguette dans sa main. Maintenant qu'elle n'était plus vraiment seule et que cette fille semblait avoir tous les malheurs du monde sur le visage, elle préféra s'inquiéter de cette lune menaçante. Elle leva la tête et aperçut le grand cercle rouge qui les « regardait » toutes les deux caché par les immeubles qui les entouraient. Roxann n'avait pas vraiment peur, pas comme l'autre jeune fille qui tremblait et qui pleurait, cette lune la fascinait, voir l'envoûtait. La petite rousse aux yeux verts n'arrivait pas à comprendre que cet astre puisse avoir une telle couleur.

*Pff, la nuit des assassins, si tu crois que tu me fais peur...* Pensa-t-elle en s'adressa à la Lune.

Elle se retourna ensuite vers la fille assise sur le trottoir et lui dire d'une voix plus douce et attentive que la toute première fois :

- Oh ! Désolée, je m'appelle Roxann. Je t'ai entendu pleurer, j'étais un peu plus loin près du Parc. Que t'arrive-t-il ? Demanda-t-elle sans vouloir parler des boutons.

Alona Smith : 10 points

Andie leva un de ces regards pleins d’espoir qu’ont parfois les enfants quand ils croient encore que les grands ont toutes les solutions, tous les remèdes. Mais celui-ci se transforma vite en consternation. Son sauveur… était une gamine, sans doute plus jeune qu’elle, par définition plus incapable. Bon, elle pourrait toujours lui demander si elle n’avait pas des parents utiles, au pire des cas. Elle tenta de lever les yeux au ciel mais l’une des pustules grossissait dangereusement près de son œil droit et elle préférait éviter un jet de pus qui lui arriverait directement sur les cornées.
L’adolescente se pencha vers elle sans même essayer de cacher son dégoût…

* Malpolie, va !… oh tais-toi, tu ne ferais pas mieux à sa place, tu ne te serais même pas arrêtée*

Mais la question ranima tout de même le peu de rage qui sommeillait encore sous la lassitude et le désespoir.

Ce qui m’arrive ? A ton avis ? Pourquoi est-ce qu’il m’arriverait quelque chose ? C’est le dernier maquillage à la mode, tu n’en as jamais entendu parler ?

Passer ainsi du murmure au sarcasme l’obligeait finalement à ouvrir plus grand la bouche, ce qui n’arrangeait rien pour elle. Les commissures de ses lèvres étaient non seulement déchirées par ses blessures, mais aussi mises à vif par le sel de ses larmes. Ce fut donc la douleur bien plus que la bienséance qui la poussa à se taire.

Et elle s’en félicita doublement puisque la jeune fille avait changé de ton, pour se montrer – enfin – compatissante.

Oui, je peux me lever, le problème ne vient pas tellement de mes jambes…
Non, il fallait qu’elle arrête l’agressivité..
Mais où veux-tu que nous allions, je n’ai pas vraiment une tête à me montrer en pleine lumière ?

*Oh ! Ca va, c'est bon ! Je m'en vais si tu veux !*

Elle en aurait été capable en plus de la laisser tomber. Ce n'était pas de sa faute si elle était trop expressive. Pff, le dernier maquillage à la mode, les garçons devaient sans doute la trouver séduisante. La jeune fille devait sans doute être l'une de celle où l'apparence comptait beaucoup. Roxann, elle, préférait être à cent pour cent na-tu-relle et puis les garçons pour l'instant ne l'intéressaient pas, mais alors pas du tout... La roussette pensa alors que niveau complicité, cela n'allait pas bien marcher. La façon dont elle lui avait répondu ne lui avait pas vraiment plus et même si après elle lui avait parlé plus doucement, la roussette lui parla sur le même ton :

-Ça c'est sûr, on ne risque pas de passer inaperçu avec toi. Quitte à avoir honte je préfère le faire toute seule...

Elle réfléchit alors sur un endroit mais rien ne lui venait :

-Bon, déjà on bouge ! Alors, dépêche-toi de remuer tes fesses, s'il te plaît.

Roxann commençait à ressentir un peu le froid traverser les mailles roses de son pyjama et toucher sa peau. Tout à l'heure elle ne s'était même pas rendu compte qu'il ne faisait pas chaud, « marcher » de cette façon l'avait fait totalement oublier la notion de température.

-Tu y crois, toi, à cette histoire de Lune Rousse ?

*Parce que moi, pas du tout*

En regardant de plus près le visage de la jeune fille, Roxann sursauta à nouveau une autre question lui était venue à l'esprit :

-Dis-moi, ce que tu as ce n'est pas contagieux j'espère...